Marchés & Financements

Développement : Yaoundé vise les 5,5 milliards € du Plan Mattei pour l’Afrique

Le ministre camerounais des Finances, Louis Paul Motaze, a reçu le 28 octobre 2025 l’ambassadeur d’Italie, Filippo Scammacca del Murgo, à l’occasion de la fin de mission du diplomate. Au cœur de leurs échanges : la perspective pour Yaoundé d’intégrer le Plan Mattei, l’initiative stratégique lancée par Rome pour renforcer ses partenariats avec le continent africain.

Lancé en décembre 2024, le Plan Mattei est doté d’une enveloppe de 5,5 milliards d’euros sur trois ans, destinée à financer des projets structurants dans des secteurs prioritaires : santé, eau, agriculture, énergie renouvelable et infrastructures. Les fonds sont mobilisés par la Cassa Depositi e Prestiti, bras financier de l’État italien, en lien avec la présidence du Conseil des ministres dirigée par Giorgia Meloni.

Selon des sources proches du ministère des Finances, l’éventuelle inclusion du Cameroun dans cette initiative européenne figure désormais parmi les options diplomatiques et économiques explorées par les deux parties. Pour le Cameroun, qui cherche à diversifier ses partenariats et à mobiliser de nouveaux financements pour soutenir son industrialisation, le Plan Mattei représenterait une opportunité stratégique.

La coopération bilatérale entre le Cameroun et l’Italie s’est renforcée au cours des quatre dernières années. Elle s’est traduite par un appui technique au secteur de l’économie sociale, la promotion du savoir-faire italien dans les filières de transformation locale (cuir, textile, agroalimentaire), ainsi que par une volonté conjointe de faire progresser les échanges entre entreprises. L’Italie compte déjà parmi les clients européens les plus réguliers des exportations camerounaises.

L’adhésion potentielle du Cameroun au Plan Mattei pourrait ouvrir l’accès à un guichet de financement ciblé pour des projets d’envergure. Le gouvernement camerounais a, par exemple, identifié plusieurs chantiers prioritaires compatibles avec les axes d’intervention du programme italien : extension du réseau énergétique, irrigation agricole, développement des infrastructures logistiques et portuaires, ou encore sécurisation de l’accès à l’eau potable en zones rurales.

Le Plan Mattei repose sur une logique de codéveloppement. Il vise à apporter des solutions aux déséquilibres économiques et sociaux à l’origine des migrations irrégulières, tout en renforçant les chaînes de valeur locales. En Afrique, il est présenté comme une alternative européenne aux approches classiques de l’aide publique au développement, en misant sur des investissements productifs à long terme.

Pour Rome, le Cameroun pourrait devenir un partenaire stratégique en Afrique centrale, région historiquement moins couverte par la diplomatie économique italienne. Pour Yaoundé, l’enjeu est double : consolider ses liens avec un État membre du G7 et accéder à des ressources financières additionnelles pour accompagner ses ambitions industrielles, agricoles et énergétiques.

Aucune annonce officielle n’a encore été faite sur une inscription formelle du Cameroun au Plan Mattei. Mais selon des observateurs à Yaoundé, les discussions sont engagées et pourraient se traduire dans les prochains mois par la soumission de projets pilotes conjoints.

Patrick Tchounjo

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