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BEAC à Dolisie : une nouvelle agence pour arrimer le sud-ouest du Congo à la finance régionale

La Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) renforce sa présence physique au Congo. Le 20 novembre 2025, à Dolisie, dans le département du Niari, le président Denis Sassou N’Guesso et le gouverneur Yvon Sana Bangui ont posé la première pierre de la future agence BEAC de Dolisie, marquant le lancement officiel des travaux d’une nouvelle infrastructure bancaire stratégique pour la CEMAC.

Pour l’institut d’émission, cette implantation au cœur du sud-ouest congolais dépasse le seul enjeu immobilier. Elle s’inscrit dans une logique de maillage territorial du réseau de la BEAC et de soutien au développement économique local, dans une région clé du pays, située sur l’axe Brazzaville – Pointe-Noire et au contact des flux économiques transfrontaliers.

Dolisie, cinquième relais de la BEAC au Congo

Avec ce projet, Dolisie, troisième ville du Congo, deviendra la cinquième localité du pays à accueillir une agence de la BEAC, après Brazzaville, Pointe-Noire, Ouesso et Oyo. Le choix de la ville n’est pas anodin : nœud ferroviaire et routier, zone d’activités agricoles, forestières et commerciales, Dolisie est un carrefour naturel entre l’hinterland et la façade atlantique.

En y installant une agence, la BEAC veut rapprocher ses services des populations et des acteurs économiques du Niari : gestion de la circulation fiduciaire, services aux banques commerciales, appui aux trésoreries publiques, sécurisation des flux d’espèces et des opérations de monnaie. À terme, cette présence renforcée doit contribuer à fluidifier la transmission de la politique monétaire, à améliorer la qualité des billets en circulation et à réduire les coûts logistiques liés aux transferts de cash entre les différentes zones du pays.

L’État congolais a mis à disposition un terrain de 3,40 hectares pour accueillir le projet. Le plan prévoit un bâtiment principal de type R+4, deux résidences R+1, un complexe sportif et des locaux techniques. Au-delà de l’image architecturale –moderne et fonctionnelle, l’ampleur du dispositif traduit l’installation de la BEAC dans la durée, avec des infrastructures pensées comme un véritable hub régional de services bancaires de banque centrale.

Une agence inscrite dans la modernisation stratégique de la BEAC

L’agence de Dolisie ne doit pas être analysée isolément. Elle s’intègre dans un programme de modernisation plus large prévu dans la vision stratégique 2026–2030 de la BEAC. L’institution projette, entre autres, la construction d’un hôpital de référence au Cameroun pour réduire les évacuations sanitaires coûteuses, la création d’un laboratoire d’ingénierie logicielle destiné à renforcer la souveraineté technologique de la CEMAC, et la mise en place de l’Institut technologique, bancaire et financier d’Afrique centrale (ITB-FAC), appelé à former les futures élites financières de la sous-région.

Ces projets témoignent d’une évolution du rôle de la banque centrale : au-delà de la stabilité monétaire et de la régulation du système bancaire, la BEAC investit dans des infrastructures stratégiques (santé, technologie, formation) qui conditionnent la résilience économique et financière de la zone CEMAC. L’agence de Dolisie s’inscrit dans ce mouvement en tant qu’outil de proximité, qui doit rendre plus tangible l’action de l’institution dans les territoires.

Impact attendu pour le système financier congolais et la CEMAC

Pour le système bancaire congolais, la présence d’une agence BEAC à Dolisie devrait faciliter la gestion quotidienne de la liquidité et des approvisionnements en billets, en particulier pour les banques commerciales, les établissements de microfinance et les institutions de paiement opérant dans le Niari et les zones limitrophes. Une meilleure accessibilité aux services de banque centrale peut réduire les délais et les coûts de certaines opérations de back-office, et sécuriser davantage la chaîne de traitement des espèces.

Pour les acteurs économiques locaux, l’installation de la BEAC est aussi un signal de confiance institutionnelle. Les entreprises, les administrations et les collectivités voient dans cette implantation un gage de stabilité et une reconnaissance du rôle de Dolisie dans la carte économique nationale. À moyen terme, cette présence peut encourager le développement de nouveaux services bancaires, l’arrivée d’établissements financiers supplémentaires et une intensification des échanges formels dans une région encore marquée par un fort poids de l’informel.

À l’échelle de la CEMAC, le projet renforce la logique d’un réseau d’agences mieux réparti sur les différents pays, condition nécessaire pour accompagner l’intégration des marchés, la montée en puissance des systèmes de paiement, et la généralisation de solutions numériques qui exigent une infrastructure de banque centrale solide, y compris en dehors des capitales.

Un signal politique et financier

La pose de la première pierre en présence du chef de l’État congolais souligne la dimension à la fois politique et économique du projet. Pour le gouvernement, l’agence de Dolisie matérialise un partenariat étroit avec la banque centrale régionale au service du développement des territoires. Pour la BEAC, il s’agit d’un message adressé aux marchés et aux partenaires : l’institution investit dans ses propres capacités, dans la qualité de ses services et dans sa proximité avec les économies locales.

Dans un contexte où l’Afrique centrale cherche à rattraper son retard en matière d’infrastructures financières et de profondeur des marchés, la future agence BEAC de Dolisie n’est pas seulement un nouveau point sur une carte. Elle est l’une des briques d’une stratégie plus globale qui vise à arrimer durablement la sous-région à une architecture bancaire moderne, capable de soutenir la croissance, la transformation des économies et l’intégration financière de la CEMAC.

Patrick Tchounjo

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