Joseph Abena sacré « Bank Creative Person of the Year 2025 » au Nigeria : la consécration d’un leadership qui a dopé UBA Cameroon

Dans un palmarès nigérian largement dominé par les figures de proue de la première économie d’Afrique, un nom camerounais s’impose et intrigue. Joseph Abena a été sacré « Bank Creative Person of the Year 2025 » par The Papers Nigeria, qui le présente comme un profil “transformateur” du secteur financier. À travers cette distinction, c’est moins une récompense de communication qu’un signal sur une nouvelle grammaire du leadership bancaire en Afrique : celle où la marque, l’influence et l’expérience client deviennent des leviers directs de performance.
Un parcours construit dans les télécoms, puis converti à la banque comme métier d’impact
Le fil rouge du parcours de Joseph Abena est la maîtrise des marchés de masse et des écosystèmes à forte intensité concurrentielle. Avant de s’imposer dans la banque, il a évolué dans l’univers des télécoms, puis de la fintech, en passant par des environnements multinationaux. Des profils et médias qui retracent son itinéraire citent des passages par Vodafone, Orange, Orange Money, avant une transition vers la finance, notamment Ecobank, puis UBA.
Ce détour n’est pas anecdotique. Dans les télécoms, la croissance se gagne au millimètre, par la distribution, la rétention, la segmentation et la vitesse d’exécution. En banque, ces réflexes deviennent un avantage compétitif dès lors que les services se digitalisent et que les clients comparent tout : rapidité, disponibilité, clarté des offres, confiance. C’est précisément à l’intersection de ces deux mondes qu’Abena a installé sa valeur.
À UBA Cameroon, une fonction marketing pensée comme un centre de profit
UBA Cameroon le présente comme Head of Marketing and Brand Communication, mettant en avant une expérience construite sur plus de 15 ans entre télécoms et finance. En janvier 2025, la filiale annonce aussi sa nomination comme Directeur régional du Marketing et de la Communication pour la CEMAC au sein du Groupe UBA, une reconnaissance interne rarement accordée sans résultats probants.
Dans la plupart des banques africaines, la communication reste parfois perçue comme une fonction d’image. L’intérêt du “cas Abena” est ailleurs : sa trajectoire met en lumière une logique de transformation où la communication devient un instrument de pilotage, au service de la conquête commerciale, de la confiance et de la gestion du risque réputationnel, notamment dans un environnement CEMAC où l’actualité économique, la réglementation et la concurrence obligent les banques à être à la fois visibles et crédibles.
Les chiffres qui pèsent : UBA Cameroon en tête des filiales du groupe hors Nigeria
Le moteur de la reconnaissance reste la performance. D’après Business in Cameroon, UBA Cameroon est devenue en 2024 la filiale la plus profitable du groupe UBA (en bénéfice net) hors Nigeria, avec un profit de 64,4 milliards de nairas, soit environ 26,3 milliards FCFA (environ 43 millions de dollars), sur la base du rapport annuel audité du groupe.
À l’échelle du groupe, la dynamique des filiales en zone CFA confirme une montée en puissance plus large. Ecofin Agency indique que les profits des filiales UBA dans l’espace CFA (UEMOA et CEMAC) ont fortement progressé en 2024 et représentent désormais une contribution nettement plus élevée au résultat du groupe, signe que l’Afrique francophone devient un relais majeur de croissance.
Cette performance ne se résume pas à une bonne année. Elle suggère une mécanique. Dans les banques, la rentabilité durable est souvent la conséquence d’un alignement entre croissance des revenus, maîtrise du risque, efficacité opérationnelle et discipline commerciale. Or, c’est précisément le champ de l’exécution.
Les méthodes d’exécution : ce que le “profil Abena” raconte du banking moderne
Il est délicat d’attribuer une performance collective à un seul dirigeant, surtout sans données internes. Mais on peut analyser les leviers plausibles qui rendent cohérente une telle trajectoire, au regard de son expertise et des responsabilités occupées.
Premier levier : la cohérence de marque comme outil de confiance. Dans des marchés où le client hésite entre banques, microfinance, fintech et mobile money, la banque qui rassure gagne du volume de dépôts et une relation plus stable. La confiance est un actif économique.
Deuxième levier : l’obsession de la distribution et du “terrain”. Un profil formé aux télécoms sait qu’une stratégie n’existe que si elle descend dans les points de contact, dans les scripts commerciaux, dans la rapidité de réponse, dans la qualité de l’onboarding.
Troisième levier : la communication comme discipline de gouvernance. Les banques performantes réduisent les zones grises. Elles clarifient leurs promesses, évitent les contradictions, structurent leur discours auprès des régulateurs, des entreprises, des médias. En CEMAC, cette dimension est d’autant plus sensible que la réputation et la conformité sont devenues des facteurs de compétitivité.
Quatrième levier : l’alignement régional. Sa fonction CEMAC implique une logique de coordination au-delà des frontières, où la banque panafricaine cherche une voix unique, tout en s’adaptant à des réalités locales (marchés, cultures, régulation, cycles économiques).
Une distinction qui dépasse le marketing : la diplomatie économique des banques panafricaines
Plusieurs articles soulignent son rôle de représentation au-delà du Cameroun, dans un périmètre régional élargi. Dans les groupes panafricains, cette posture s’apparente à une diplomatie économique : porter la marque, sécuriser la relation aux parties prenantes, défendre la crédibilité du groupe dans des cercles d’influence, parfois plus décisifs que la publicité.
C’est aussi cela que raconte The Papers en consacrant Joseph Abena : la créativité bancaire n’est pas une affaire de slogans, mais de capacité à produire des résultats concrets dans un secteur où la confiance, la vitesse et la conformité deviennent les nouvelles monnaies.
Ce que son parcours dit de l’Afrique francophone
L’irruption d’un Camerounais dans un palmarès à visibilité nigériane a une valeur symbolique claire. Elle confirme que l’Afrique francophone ne se limite plus à un rôle de marchés périphériques : elle devient un terrain où se fabriquent des performances, des innovations de management et des profils exportables dans les circuits continentaux.
Pour les jeunes cadres et les institutions, le message est simple : les trajectoires hybrides télécoms, fintech, banque deviennent un avantage, à condition de savoir transformer la créativité en discipline d’exécution. Et dans la banque africaine de la décennie qui s’ouvre, l’exécution est peut-être la compétence la plus rare.
Patrick Tchounjo



