Afrique francophone : la montée en puissance des banques locales et régionales face au désengagement des groupes étrangers

Le secteur bancaire en Afrique francophone connaît une recomposition profonde. Alors que plusieurs grands groupes internationaux réduisent leur présence, les banques locales et régionales s’imposent comme de nouveaux piliers du système financier, redessinant l’équilibre entre acteurs historiques et nouveaux champions.
Depuis quelques années, les géants européens comme Société Générale ou BNP Paribas ont cédé plusieurs de leurs filiales sur le continent, privilégiant désormais leurs marchés européens et asiatiques. Ce retrait progressif a ouvert un espace que des institutions régionales telles que BGFIBank, Coris Bank International, Orabank, NSIA Banque ou encore la Banque Nationale d’Investissement (BNI) en Côte d’Ivoire se sont empressées d’occuper. Leur force réside dans une meilleure connaissance du terrain, une proximité culturelle avec la clientèle et une capacité d’adaptation aux besoins spécifiques des PME, de l’agriculture ou encore des économies locales.
La digitalisation agit comme un puissant levier de transformation. Grâce aux services mobiles, aux partenariats avec les fintechs et à l’interopérabilité avec le mobile money, ces banques proposent des solutions plus rapides et inclusives. Le lancement récent par la BCEAO de la plateforme de paiements instantanés PI-SPI, qui relie banques, mobile money et microfinances dans l’UEMOA, illustre cette nouvelle dynamique.
Cette montée en puissance s’accompagne toutefois de nombreux défis. Le renforcement des fonds propres, l’amélioration de la gouvernance et la conformité aux normes internationales en matière de lutte contre le blanchiment et de cybersécurité constituent des chantiers coûteux mais incontournables. La pression réglementaire accrue de la BCEAO et de la COBAC oblige les établissements à investir lourdement, au risque d’entamer leurs marges.
Malgré ces contraintes, la consolidation bancaire ouvre la voie à l’émergence de véritables champions régionaux capables de rivaliser avec les standards internationaux. En s’engageant dans les financements verts, en soutenant l’inclusion financière et en investissant dans les infrastructures, les banques locales et régionales pourraient devenir les catalyseurs d’un nouveau modèle de développement pour l’Afrique francophone.
Patrick Tchounjo



