Régulation & Conformité

Cameroun : cap sur 2026 pour sortir de la liste grise du GAFI

Le Cameroun se donne jusqu’à la fin de l’année 2026 pour sortir de la liste grise du Groupe d’action financière (GAFI), qui regroupe les juridictions placées sous surveillance accrue en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LBC/FT).
L’annonce a été faite par Hubert Ndé Sambone, directeur général de l’Agence nationale d’investigation financière (Anif), dans un entretien accordé à Cameroon Tribune.

Cette déclaration intervient quelques jours après la confirmation du maintien du Cameroun sur la liste grise, le 24 octobre 2025, lors de la dernière réunion plénière du GAFI. Une décision attendue, mais qui souligne la nécessité pour Yaoundé d’accélérer les réformes structurelles entamées depuis deux ans.

Un calendrier plus réaliste et une feuille de route renforcée

« Nous nous fixons nous-mêmes comme date butoir la fin 2026. Nous allons nous battre pour que le Cameroun sorte de cette liste à cette date », a affirmé Hubert Ndé Sambone.
Initialement, le pays espérait une levée de la mesure en septembre 2025, mais le GAFI a estimé que certaines actions restaient inachevées, notamment dans la mise en œuvre des sanctions financières ciblées, le suivi des professions non financières et la transparence des bénéficiaires effectifs des sociétés.

L’Anif a d’ailleurs transmis un cinquième rapport de suivi à l’organisme intergouvernemental, soulignant les progrès enregistrés sur le plan normatif et opérationnel, mais aussi les défis persistants liés à la coordination institutionnelle.

Un enjeu de crédibilité financière internationale

Le maintien du Cameroun sur la liste grise du GAFI constitue un signal d’alerte pour les partenaires financiers internationaux. Être classé parmi les juridictions « sous surveillance accrue » n’entraîne pas de sanctions directes, mais accroît la vigilance des institutions bancaires mondiales et peut ralentir les flux financiers transfrontaliers.

Cette situation pèse sur la réputation du pays et renforce la pression sur les autorités à améliorer la traçabilité des opérations financières, en particulier celles liées au commerce, aux marchés publics et aux secteurs sensibles comme l’immobilier et les BTP.

Pour Yaoundé, la sortie de cette liste est donc autant un enjeu économique qu’un défi de gouvernance. Elle conditionne la confiance des investisseurs, le classement du pays dans les évaluations internationales, et l’accès fluide aux financements extérieurs.

Des réformes déjà engagées, mais à consolider

Depuis son inscription sur la liste grise, en février 2023, le Cameroun a adopté plusieurs mesures importantes : renforcement du cadre juridique de la lutte contre le blanchiment d’argent, amélioration du contrôle des transferts internationaux, et création de cellules spécialisées au sein des institutions financières pour surveiller les transactions suspectes.

Des efforts notables ont également été déployés pour sensibiliser les acteurs économiques à la conformité, notamment dans les secteurs bancaires, microfinanciers et notariaux. L’Anif a multiplié les sessions de formation et de coopération avec les organismes régionaux, notamment la Commission bancaire de l’Afrique centrale (Cobac) et la BEAC.

Cependant, les observateurs notent que l’application des textes demeure encore inégale, particulièrement en ce qui concerne la détection proactive des opérations à risque et la transmission systématique d’informations aux autorités compétentes.

Un test de gouvernance financière pour le Cameroun

La sortie de la liste grise du GAFI serait un succès stratégique pour l’État camerounais, symbolisant son engagement à aligner son système financier sur les standards internationaux.
Pour y parvenir, le pays devra renforcer la coordination interinstitutionnelle entre le ministère des Finances, la Justice, les banques et les services de sécurité, tout en garantissant une application rigoureuse des mesures de conformité.

Cette échéance de 2026 s’inscrit dans une logique de crédibilité internationale, alors que le Cameroun cherche à améliorer son attractivité économique et à consolider sa place au sein des marchés financiers régionaux et internationaux.

Comme l’a résumé un expert du secteur bancaire : « Sortir de la liste grise du GAFI, c’est restaurer la confiance, ouvrir les canaux financiers, et repositionner le Cameroun comme un partenaire fiable sur la scène économique mondiale. »

Patrick Tchounjo

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