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CEMAC : la BEAC cherche à renforcer ses liens avec les banques centrales de Chine et d’Égypte

La Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) multiplie les ouvertures diplomatiques et financières. Son gouverneur, Yvon Sana Bangui, a annoncé l’intention de renforcer la coopération avec la Banque populaire de Chine et la Banque centrale d’Égypte, une initiative qui s’inscrit dans un contexte de pressions croissantes sur les réserves de change et de recherche de diversification monétaire.

Des partenariats stratégiques en perspective

La Chine, premier partenaire commercial de plusieurs pays de la CEMAC, apparaît comme un acteur incontournable. Pékin est déjà le principal acheteur des matières premières de la sous-région et un investisseur majeur dans les infrastructures. Un rapprochement avec la Banque populaire de Chine pourrait faciliter l’usage du yuan dans les transactions commerciales et réduire la dépendance exclusive au franc CFA et à l’euro.

L’Égypte, pour sa part, est un acteur clé en Afrique du Nord et au sein de l’Union africaine. Renforcer les liens avec sa banque centrale permettrait à la CEMAC de consolider les passerelles intra-africaines, dans un contexte où les institutions régionales plaident pour une meilleure intégration des systèmes financiers du continent.

Des motivations économiques et politiques

La décision de la BEAC intervient alors que les réserves de change de la CEMAC ont reculé de 5 % en 2024, puis chuté de près de 1 000 milliards FCFA en deux mois à la mi-2025. En diversifiant ses partenariats, la banque centrale cherche à sécuriser ses actifs, élargir ses leviers de négociation et réduire sa vulnérabilité aux chocs extérieurs.

Ce projet reflète également une volonté d’affirmer une plus grande autonomie vis-à-vis des partenaires traditionnels, notamment la France et la zone euro. L’ouverture à de nouveaux acteurs pourrait rééquilibrer les relations et donner plus de marge de manœuvre aux pays de la CEMAC dans la gestion de leur politique monétaire.

Des risques non négligeables

Un rapprochement avec la Chine et l’Égypte comporte toutefois des zones d’incertitude. La dépendance accrue vis-à-vis du yuan ou d’accords bilatéraux pourrait complexifier la gestion des réserves et accroître la volatilité des portefeuilles. Les critiques pointent également le risque de politisation d’un processus qui devrait rester avant tout technique et prudentiel.

Enfin, la compatibilité de ces partenariats avec les engagements existants de la CEMAC, notamment vis-à-vis du Trésor français qui garantit la convertibilité du franc CFA, reste une question sensible.

Un signal fort pour l’avenir de la CEMAC

En cherchant à renforcer ses relations avec la Chine et l’Égypte, la BEAC envoie un message clair : la stabilité du système monétaire régional ne peut plus reposer sur un seul axe de coopération. La diversification apparaît comme une réponse aux pressions actuelles sur les réserves de change, mais aussi comme un levier stratégique pour inscrire la CEMAC dans un écosystème financier mondial en pleine recomposition.

Patrick Tchounjo

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