Heirs Energy obtient un financement historique d’Afreximbank d’une valeur de 750 millions de dollars.

Heirs Energies, société pétrolière et gazière nigériane contrôlée par le banquier et investisseur Tony Elumelu, vient d’obtenir une facilité de financement de 750 millions de dollars auprès d’Afreximbank, dans le but d’accélérer sa montée en puissance dans l’amont pétrolier. Signé à Abuja le 20 décembre 2025, l’accord prend la forme d’un financement “reserve-based lending” (RBL) senior sécurisé, d’une maturité de cinq ans, combinant refinancement de dette et nouveaux apports pour soutenir l’expansion de la production.
Derrière l’annonce, la transaction est un signal fort pour la finance africaine : elle confirme la capacité d’une banque panafricaine à structurer des volumes habituellement réservés à des pools internationaux, sur un actif d’hydrocarbures opéré par un acteur africain, dans un contexte où l’énergie redevient un enjeu de souveraineté économique autant qu’un débat de transition.
Un financement indexé sur les réserves, conçu pour libérer l’investissement
Le mécanisme RBL n’est pas anodin. Dans ce schéma, la capacité d’endettement est directement adossée à la valeur économique des réserves et aux cash-flows attendus des champs. Pour un producteur comme Heirs Energies, cela permet de transformer un portefeuille d’actifs matures en levier de financement, tout en imposant une discipline opérationnelle : trajectoire de production crédible, gouvernance, reporting, contrôles de sûretés et gestion des risques de prix.
Afreximbank présente l’opération comme un financement structurant, destiné à soutenir une stratégie de croissance accélérée de Heirs Energies. La banque souligne aussi la dimension “domestic energy capacity”, c’est-à-dire l’impact attendu sur l’offre énergétique nigériane et, par ricochet, sur la stabilité macroéconomique.
Après le désendettement, une optimisation du bilan
La transaction intervient après une phase de désendettement progressive. Lors du rachat en 2021 de la licence OML 17 auprès d’un consortium incluant Shell, Total et Eni, Heirs Energies avait levé environ 1,1 milliard de dollars, dont l’essentiel aurait été remboursé après près de quatre ans d’exploitation, ouvrant la voie à une nouvelle structure de financement plus “efficiente” et plus orientée croissance.
Dans une logique de Harvard, c’est là que l’opération devient intéressante : elle ressemble moins à une dette de survie qu’à une dette de transformation. Le refinancement améliore la lisibilité du bilan, et le nouveau capital permet de financer le prochain cycle de production sans diluer la trajectoire de contrôle, un point central pour un groupe qui revendique la construction d’un champion africain “détenu par des Africains”.
Objectif : quasi doubler pétrole et gaz, sans changer de géographie d’actifs
Sur le plan opérationnel, Heirs Energies indique produire plus de 50 000 barils par jour et environ 120 millions de m³ de gaz, avec un objectif d’atteindre environ 100 000 barils par jour et 250 millions de m³ à moyen terme. La stratégie annoncée repose principalement sur l’optimisation des champs existants et une meilleure valorisation du gaz, plutôt que sur une communication centrée sur de nouveaux forages majeurs.
C’est une trajectoire typique des actifs onshore et shallow-water repris aux majors : l’enjeu n’est pas de “découvrir”, mais de faire mieux que le précédent opérateur sur la récupération, la maintenance, la sécurité des opérations et l’efficacité des investissements.
Afreximbank consolide un rôle de banque “systémique” sur l’énergie
Le message politique et financier porté par Tony Elumelu est explicite. Il présente l’opération comme une preuve de confiance d’institutions africaines envers des entreprises africaines, et positionne Afreximbank comme l’une des institutions les plus influentes du continent pour le financement de projets de grande taille.
Du côté d’Afreximbank, la communication insiste sur une vision de long terme et sur le caractère stratégique de l’énergie pour la stabilité et la croissance. En termes bancaires, ce type de transaction renforce un positionnement : celui d’une banque capable d’adosser son bilan à des actifs réels, de structurer du risque project finance, et d’entraîner d’autres investisseurs via des effets de démonstration.
Le contexte nigérian : l’ascension des producteurs locaux s’accélère
L’opération s’inscrit dans une dynamique plus large : le retrait progressif de certaines majors des actifs onshore nigérians et la montée en puissance d’acteurs locaux repreneurs. Plusieurs analyses et publications sectorielles soulignent cette recomposition du paysage, avec des acquisitions d’actifs et une redéfinition des modèles d’exploitation autour d’opérateurs indigènes.
Pour les marchés financiers africains, l’enjeu dépasse le Nigeria. Si les banques africaines réussissent à multiplier ce type de structures sur des actifs générateurs de cash-flows, elles renforcent leur capacité à financer des projets “lourds” et à réduire la dépendance systématique aux syndications offshore.
Ce que la transaction dit, en creux, au secteur bancaire africain
Cette facilité de 750 millions de dollars peut être lue comme un test grandeur nature de la finance africaine sur trois plans. D’abord, la capacité à structurer du risque long et sécurisé sur la base d’actifs réels, avec des standards de gouvernance compatibles avec des tickets élevés. Ensuite, l’aptitude à financer l’énergie sans se limiter au discours de transition, en intégrant le gaz comme pivot de souveraineté et de compétitivité industrielle. Enfin, la démonstration qu’une banque panafricaine peut occuper une place centrale dans des transactions structurées, au bénéfice d’acteurs africains.
En résumé, Heirs Energies obtient des moyens conséquents pour viser un quasi doublement de production, tandis qu’Afreximbank consolide un rôle de prêteur structurant sur un secteur où le financement, plus que jamais, conditionne la trajectoire industrielle.
Heirs Energy obtient un financement historique d’Afreximbank.



