La Côte d’Ivoire verrouille son couloir vers le Sahel avec un financement de la BID

La Côte d’Ivoire renforce l’un de ses couloirs logistiques les plus stratégiques avec l’appui de la Banque islamique de développement (BID). L’institution annonce un financement de 131 milliards FCFA destiné à la modernisation du tronçon Tafiré–Ferkessédougou, un axe clé reliant le centre au nord et s’inscrivant dans la dynamique du corridor Abidjan–Ouagadougou. Au-delà du chantier, l’enjeu est économique : réduire les coûts de transport, sécuriser les flux de marchandises, raccourcir les délais de transit et consolider l’attractivité du nord ivoirien, dans un contexte où la compétitivité des chaînes d’approvisionnement et le commerce régional dépendent de plus en plus de la qualité des infrastructures routières.
131 milliards FCFA pour sécuriser le corridor Abidjan–Ouagadougou ; La BID finance le tronçon Tafiré–Ferkessédougou et accélère le pari du Nord ; Côte d’Ivoire : un financement de 200 millions d’euros pour moderniser une artère stratégique vers le Burkina ; Du bitume à la compétitivité : la BID renforce l’axe Abidjan–Nord ivoirien ; Corridor régional : la Côte d’Ivoire verrouille un maillon clé avec l’appui de la BID.
La Côte d’Ivoire vient d’enregistrer un soutien financier majeur sur l’un de ses axes routiers les plus sensibles. La Banque islamique de développement (BID) annonce un montant de 131 milliards de FCFA, équivalant à 200 millions d’euros, destiné à la modernisation du tronçon Tafiré–Ferkessédougou. Dans l’architecture logistique du pays, cette section n’est pas une simple route nationale : elle relie le centre au nord, irrigue des bassins économiques et agricoles, et s’inscrit comme un maillon important du corridor qui connecte Abidjan à Ouagadougou.
Le choix du tronçon n’a rien d’anodin. Entre la façade maritime et l’hinterland sahélien, la compétitivité se joue sur des détails très concrets : le temps de parcours, l’usure des véhicules, la régularité des flux, la sécurité, la capacité à absorber des volumes croissants sans transformer la route en goulot d’étranglement. En modernisant Tafiré–Ferkessédougou, l’objectif implicite est de réduire le coût du “kilomètre logistique”, ce coût invisible qui finit par se répercuter sur le prix des denrées, sur les marges des transporteurs, sur la performance des chaînes d’approvisionnement et, au bout du compte, sur la compétitivité des entreprises.
L’annonce, souvent présentée comme un “décaissement”, doit toutefois être comprise dans la mécanique classique des financements multilatéraux. Un engagement financier ne signifie pas nécessairement que les fonds arrivent en une seule fois. Dans la plupart des cas, les décaissements se font au rythme du projet, suivant l’avancement des travaux, la validation des étapes techniques, la conformité des procédures de passation des marchés et les exigences de contrôle. Autrement dit, l’impact économique dépendra autant du financement que de la capacité d’exécution : gouvernance du chantier, respect des délais, maîtrise des coûts, qualité des travaux et, surtout, maintenance après livraison.
Au-delà de la route elle-même, la portée est régionale. Le corridor Abidjan–Ouagadougou est un couloir vital pour le commerce sous-régional. Il porte des flux de marchandises, d’intrants, de produits agricoles, de matériaux et de consommation courante. Le moderniser, c’est aussi sécuriser un rôle stratégique : celui d’une plateforme de transit et d’approvisionnement, dans un environnement où les routes structurantes deviennent des actifs économiques autant que des infrastructures.
Dans l’écosystème financier, ce type de projet a un effet d’entraînement discret mais réel. Une route plus fiable réduit l’incertitude et rend plus lisibles les chaînes logistiques. Cela pèse sur la structuration du financement du commerce, sur la capacité des entreprises à honorer leurs contrats, sur le calibrage des crédits de campagne, sur la gestion des stocks, sur l’assurance des marchandises transportées et sur la viabilité d’activités connexes qui vivent des corridors, de la logistique à la maintenance en passant par l’entreposage et les services.
Reste la question centrale, souvent absente des annonces : la transformation d’un financement en gains concrets pour l’économie. Si les procédures tiennent, si les travaux respectent les standards, si le suivi est rigoureux, Tafiré–Ferkessédougou peut devenir davantage qu’un chantier. Il peut devenir un accélérateur de circulation, un réducteur de coûts, un stabilisateur de flux et un signal de confiance pour l’investissement privé autour de l’axe. À ce stade, la BID met les moyens ; la Côte d’Ivoire est attendue sur la livraison.
Patrick Tchounjo



