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Obligations Bdeac 2021-2028 : 5,1 milliards FCFA d’intérêts servis, la Bvmac rassurée

La Banque de développement des États de l’Afrique centrale (Bdeac) continue de consolider sa réputation d’émetteur de référence sur le marché obligataire de la Bourse des valeurs mobilières de l’Afrique centrale (Bvmac). Le 8 décembre 2025, l’institution sous-régionale a procédé, sur la place de Douala, au remboursement d’une enveloppe totale de 28,1 milliards FCFA au titre de son emprunt obligataire 2021-2028, confirmant le respect strict du calendrier promis aux investisseurs.

Selon le communiqué publié par la Bvmac, cette quatrième échéance combine 22,9 milliards FCFA de principal et 5,1 milliards FCFA d’intérêts, dans le cadre d’un schéma d’amortissement progressif. Pour un marché encore peu profond comme celui de la Cemac, la régularité de ces flux est un indicateur clé de crédibilité et de profondeur financière.

Un coupon net de 2 448 FCFA par obligation

Pour les porteurs, le message est concret. La Bvmac précise que le coupon net à percevoir par obligation s’élève à 2 448 FCFA, composé de 2 000 FCFA au titre de l’amortissement du principal et de 448 FCFA pour le paiement des intérêts. Les opérations d’encaissement débutent le 9 décembre 2025, via les sociétés de bourse et les banques teneurs de comptes.

Ce mécanisme confirme la structure de l’emprunt 2021-2028 : un titre à remboursement échelonné, qui réduit progressivement l’exposition au risque de l’investisseur tout en garantissant un flux d’intérêts régulier. Pour la Bdeac, il s’agit d’un instrument de financement de moyen-long terme aligné sur la maturité de ses projets d’infrastructures et de développement dans les six pays de la Cemac.

En servant intégralement cette quatrième échéance, la banque régionale envoie un double signal. D’une part, la soutenabilité de sa trajectoire d’endettement et la qualité de son profil de risque restent intactes. D’autre part, elle confirme aux investisseurs locaux et régionaux que les engagements contractuels pris sur la Bvmac sont tenus dans les délais.

Bdeac, moteur de la rémunération des investisseurs Bvmac

Depuis son arrivée, en 2020, sur le marché financier unifié de la Cemac (Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, Tchad, RCA), la Bdeac a rapidement pris une place centrale dans l’animation du compartiment obligataire. Avec six lignes d’obligations cotées, elle s’est imposée comme le principal pourvoyeur de rendement pour les investisseurs institutionnels et individuels actifs sur la Bvmac.

Les chiffres de 2023 illustrent cette domination. Sur un total de 76,5 milliards FCFA d’intérêts servis aux investisseurs sur l’ensemble du marché, 57 milliards FCFA, soit 74,5 %, proviennent des émissions de la Bdeac. Les taux d’intérêt proposés par l’institution lors de ses levées de fonds en bourse oscillent entre 4,7 % et 6,2 %, des niveaux attractifs dans un environnement de taux encore relativement élevés, mais où la prime de risque reste un enjeu majeur pour les investisseurs.

En pratique, la Bdeac joue de plus en plus le rôle de benchmark de crédit pour la région : ses émissions servent de référence pour le pricing d’autres signatures publiques ou parapubliques. Pour les gestionnaires d’actifs, la présence de ces lignes liquides et récurrentes permet de structurer des portefeuilles obligataires diversifiés, avec un socle de titres dits « investment grade » à l’échelle sous-régionale.

Un soutien majeur à la profondeur du marché Cemac

Dans un marché encore modeste en taille, où le nombre d’émetteurs privés reste limité et où les États dominent le compartiment obligataire, le rôle de la Bdeac dépasse la simple logique de financement de ses propres besoins.

En multipliant les émissions et en respectant scrupuleusement ses échéances, la banque de développement contribue à :

renforcer la confiance des investisseurs dans la Bvmac, offrir des opportunités de placement à horizon long terme en monnaie locale, structurer une courbe de taux plus lisible pour la Cemac, soutenir la montée en compétence des intermédiaires (sociétés de bourse, banques teneurs de comptes, asset managers).

Pour les caisses de retraite, compagnies d’assurances et fonds d’investissement basés dans la sous-région, ces émissions couplées à des remboursements réguliers constituent un outil précieux pour la gestion actif-passif, dans un environnement où les alternatives liquides restent rares.

Un contexte de resserrement monétaire et de besoins croissants

L’exécution sans incident du calendrier de remboursement intervient dans un contexte particulier pour la Cemac. La Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) a engagé ces dernières années un resserrement monétaire pour contenir l’inflation et préserver les réserves de change, ce qui a contribué à une remontée des taux sur les adjudications souveraines et sur certains financements bancaires.

Dans ce cadre, les obligations de la Bdeac, calibrées entre 4,7 % et 6,2 %, apparaissent comme un compromis jugé attractif par de nombreux investisseurs : rendement supérieur à celui de certaines émissions souveraines de court terme, mais profil de risque perçu comme mieux maîtrisé, compte tenu du statut multilatéral de la banque et de la diversification de son portefeuille de projets.

Parallèlement, les besoins de financement des États de la Cemac restent considérables, notamment pour les infrastructures de transport, d’énergie, de télécommunications ou de développement urbain. La Bdeac, en tant qu’institution spécialisée, joue un rôle d’intermédiation entre ces besoins et l’épargne longue disponible localement, en complément des financements extérieurs traditionnels (banques internationales, marchés eurobonds, partenaires bilatéraux).

Crédibilité obligataire et agenda de développement

En respectant son échéancier 2021-2028, la Bdeac consolide sa crédibilité obligataire au moment où les bailleurs et les marchés internationaux scrutent de près la qualité des signatures africaines. Les défauts ou restructurations de dette observés sur certains marchés du continent ont rappelé l’importance de la discipline financière et de la transparence dans la communication avec les investisseurs.

La banque de développement d’Afrique centrale cherche, à l’inverse, à se positionner comme un émetteur exemplaire, combinant discipline de remboursement, communication régulière et utilisation ciblée des ressources mobilisées sur des projets ayant un impact mesurable sur la croissance et l’intégration régionale.

En servant 5,1 milliards FCFA d’intérêts sur cette nouvelle échéance, elle envoie aussi un message politique : les marchés domestiques peuvent devenir une source stable et prévisible de financement du développement, à condition d’être traités comme tels par les émetteurs.

Vers une montée en puissance du financement par le marché ?

La question qui se pose désormais est celle de la scalabilité de ce modèle. Si la Bdeac continue d’honorer ses engagements et de proposer des rendements compétitifs, elle pourrait accroître encore ses volumes d’émission sur la Bvmac, tout en incitant d’autres institutions publiques et privées à l’imiter.

Un scénario de montée en puissance passerait par plusieurs leviers : augmentation de la base d’investisseurs, notamment régionaux ; développement de produits d’épargne grand public adossés à des portefeuilles obligataires ; amélioration de la liquidité secondaire des titres cotés ; renforcement des capacités des régulateurs et des acteurs de marché.

En attendant, le remboursement de 28,1 milliards FCFA au titre de l’emprunt 2021-2028, dont 5,1 milliards FCFA d’intérêts servis en temps et en heure, confirme la place particulière de la Bdeac dans l’écosystème financier d’Afrique centrale : celle d’un émetteur pivot, à la fois instrument de politique de développement et pilier de la rémunération de l’épargne régionale.

Patrick Tchounjo

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