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Réserves de change en CEMAC : Sana Bangui justifie la baisse et appelle au calme

Les réserves de change de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) suscitent des débats intenses depuis plusieurs mois. Après avoir culminé en 2023, elles ont reculé de près de 5 % en 2024, pour atteindre 6 539 milliards FCFA, selon les données officielles de la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC). À la mi-septembre 2025, la situation s’est accentuée avec une perte estimée à 1 000 milliards FCFA en seulement deux mois, ramenant le stock à environ 6 667 milliards FCFA.

Face à ces signaux d’alerte, le gouverneur de la BEAC, Yvon Sana Bangui, s’est exprimé publiquement afin de relativiser la gravité du recul. Selon lui, la baisse ne traduit pas une fragilité structurelle du franc CFA mais reflète le déséquilibre entre les flux entrants et sortants. Depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle réglementation des changes en 2019, les devises rapatriées sont passées de 6 201 milliards FCFA à près de 13 898 milliards FCFA en 2024. Mais une large part de ces flux repart presque immédiatement, alimentant les importations massives et les transferts financiers à l’étranger.

Sana Bangui estime que le niveau actuel des réserves reste « confortable mais fragile », tout en reconnaissant que la dépendance extérieure de la sous-région pèse lourdement sur leur évolution. Il appelle les États membres à accélérer les politiques d’import-substitution et de transformation locale pour réduire l’hémorragie de devises.

Pour les observateurs, la tendance demeure préoccupante. La baisse rapide des réserves interroge sur la capacité de la CEMAC à maintenir une couverture suffisante de ses importations et à assurer la crédibilité de sa monnaie. La Conférence des chefs d’État a d’ailleurs réclamé une application stricte de la réglementation des changes, en particulier pour les secteurs pétrolier et minier, encore accusés de retarder le rapatriement des devises.

Le dilemme est clair : comment préserver la solidité monétaire dans un contexte de pressions extérieures croissantes, tout en soutenant la croissance régionale ? Pour Sana Bangui, la réponse passe par un renforcement de la discipline monétaire et par des réformes structurelles capables de limiter la dépendance aux importations.

En attendant, la BEAC s’efforce de maintenir la confiance en affichant sa détermination à appliquer une gestion rigoureuse et transparente des réserves. Mais la trajectoire actuelle souligne la vulnérabilité persistante de la CEMAC, dont l’équilibre financier dépend encore largement des cours des matières premières et de la discipline des États membres.

Patrick Tchounjo

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