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Côte d’Ivoire : un industriel bancaire ivoirien reprend la mine d’or de Tongon, un tournant pour la souveraineté minière nationale

La Côte d’Ivoire vient de franchir une étape historique dans son développement économique. Un groupe bancaire ivoirien a conclu un accord majeur avec un géant minier international pour le rachat de la mine d’or de Tongon, située dans le nord du pays. Cette transaction, évaluée à environ 305 millions de dollars, marque une première dans l’histoire du pays : celle du transfert d’un actif aurifère mondial vers un acteur local.

Située dans la région du Tchologo, près de Korhogo, la mine de Tongon est entrée en production en 2010 et affiche depuis des performances constantes, avec une production annuelle d’environ 200 000 onces d’or. L’acquisition comprend également plusieurs permis d’exploration adjacents, renforçant le potentiel d’expansion du site.

Un tournant stratégique pour l’industrie minière ivoirienne

Cette opération constitue un jalon clé dans la montée en puissance du capital industriel ivoirien. Elle illustre la volonté croissante des acteurs nationaux de jouer un rôle central dans la gestion et la valorisation des ressources naturelles du pays. Jusqu’ici, la majorité des mines d’or en Côte d’Ivoire étaient exploitées par des multinationales étrangères.

Désormais, un acteur local prend le relais, symbolisant une nouvelle ère où les industries nationales s’imposent dans les secteurs stratégiques. L’enjeu dépasse la simple logique de production : il s’agit d’ancrer la valeur ajoutée sur le territoire, de renforcer la maîtrise des chaînes d’approvisionnement et de promouvoir un modèle d’exploitation responsable.

Selon le ministère des Mines, cette transaction « traduit la maturité et la crédibilité croissante du secteur privé ivoirien » et pourrait servir de référence pour d’autres partenariats public-privé dans le domaine minier.

Une vision de souveraineté et d’intégration locale

Au-delà de la dimension financière, cette reprise s’inscrit dans une stratégie de souveraineté économique. Elle vise à faire de l’exploitation des ressources naturelles un moteur de développement local, capable de générer de la valeur et des emplois durables.

Les retombées économiques attendues sont considérables : augmentation des recettes fiscales, création d’emplois directs et indirects, renforcement des compétences techniques locales et essor des services auxiliaires liés à la mine (logistique, maintenance, transport, sécurité, restauration).

Cette approche s’aligne avec la volonté du gouvernement ivoirien de diversifier son économie et de positionner la Côte d’Ivoire comme un pôle minier régional tout en garantissant une meilleure redistribution des richesses.

Un signal fort pour les investisseurs africains

Le rachat de la mine de Tongon envoie également un message fort aux investisseurs africains. Il démontre qu’il est désormais possible pour des industriels locaux de reprendre le contrôle d’actifs internationaux et de les exploiter selon des standards mondiaux de gouvernance et de durabilité.

Ce changement de paradigme pourrait inspirer d’autres pays du continent où la question de la propriété locale des ressources naturelles devient un enjeu central du débat économique. L’Afrique de l’Ouest, qui représente plus d’un quart de la production aurifère du continent, voit émerger une nouvelle génération d’acteurs capables de rivaliser avec les majors mondiaux sur le plan technique et financier.

Vers une nouvelle ère de capitalisme africain

Cette transaction symbolise la montée en puissance d’un capitalisme africain mature et souverain, fondé sur la réappropriation des leviers économiques stratégiques. Elle s’inscrit dans un contexte où de plus en plus d’États africains encouragent la participation nationale au capital minier, afin de maximiser les bénéfices économiques locaux.

En s’appuyant sur des capitaux africains et une expertise industrielle consolidée, cette acquisition redessine les contours du paysage minier ivoirien. Elle ouvre la voie à un nouveau modèle d’exploitation inclusive, où la création de valeur se conjugue avec l’autonomisation économique du continent.

Un précédent prometteur pour l’Afrique de l’Ouest

L’opération de Tongon pourrait créer un précédent à l’échelle régionale. D’autres pays producteurs d’or, tels que le Ghana, le Mali ou le Burkina Faso, suivent de près cette évolution. Elle pourrait accélérer la tendance vers une africanisation des ressources naturelles et stimuler la mise en place de partenariats équilibrés entre capitaux locaux et investisseurs étrangers.

L’enjeu dépasse la seule Côte d’Ivoire : il s’agit de bâtir une Afrique capable d’exploiter et de transformer ses richesses selon ses propres priorités économiques et sociales.

Avec ce rachat, la Côte d’Ivoire s’affirme comme un modèle de leadership économique africain, démontrant qu’il est désormais possible de conjuguer ambition industrielle, vision stratégique et souveraineté économique.

Patrick Tchounjo

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