GAFI : l’Afrique progresse, le Cameroun reste à la traîne

Le Groupe d’action financière (GAFI) dirige l’action mondiale de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme et de la prolifération.
L’Afrique avance, mais le Cameroun reste à quai. Quatre pays africains viennent d’être retirés de la liste grise du Groupe d’action financière (GAFI), marquant une étape majeure dans la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme sur le continent. Le Burkina Faso, le Nigéria, l’Afrique du Sud et le Mozambique sortent de cette catégorie de juridictions sous surveillance renforcée. Un signal fort de la communauté financière internationale, qui salue leurs progrès en matière de conformité et de transparence.
Pour ces pays, cette décision représente une victoire stratégique. Elle récompense des efforts de réformes structurelles, la mise en place de cadres législatifs plus solides et une coopération accrue avec les institutions de supervision financière régionales. Elle traduit aussi la volonté de bâtir des économies plus crédibles aux yeux des investisseurs internationaux. Sortir de la liste grise, c’est regagner la confiance des marchés, réduire les risques perçus et ouvrir la voie à des flux financiers plus stables et à moindre coût.
Mais pendant que d’autres avancent, le Cameroun reste bloqué sur cette liste sensible. Ce maintien révèle un déficit de gouvernance financière et un retard dans la mise en œuvre des réformes attendues par le GAFI. Yaoundé est encore perçu comme un environnement où les mécanismes de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme demeurent insuffisamment efficaces. Cette situation alimente la prudence des bailleurs et des investisseurs, qui y voient un facteur de risque supplémentaire.
Rester sur la liste grise n’est pas anodin. Cela signifie que le pays doit redoubler d’efforts pour assainir son système financier, renforcer la supervision bancaire, et imposer une meilleure transparence dans les circuits de financement public et privé. Le Cameroun dispose pourtant d’atouts importants : une économie diversifiée, un système bancaire solide, et une administration financière expérimentée. Mais sans volonté politique claire et sans coordination institutionnelle forte, ces atouts resteront sous-exploités.
À l’inverse, la sortie de quatre pays africains de la liste grise montre que le changement est possible. L’Afrique du Sud, par exemple, a multiplié les mesures de conformité dans ses banques et intensifié la traque des flux suspects. Le Nigéria a amélioré la transparence sur les bénéficiaires effectifs des entreprises. Le Burkina Faso a restructuré son dispositif de surveillance financière et adopté une approche proactive dans la collecte d’informations sur les transactions à risque.
Pour le Cameroun, l’enjeu n’est plus seulement de figurer sur une liste, mais de restaurer sa crédibilité régionale et internationale. À un moment où les financements concessionnels se raréfient et où la confiance des marchés est déterminante, chaque point de conformité compte. Sortir de la liste grise du GAFI serait un signal fort aux investisseurs et aux partenaires économiques, confirmant la capacité du pays à rejoindre la dynamique africaine vers la transparence et la bonne gouvernance financière.
En somme, l’Afrique montre qu’elle peut bâtir des systèmes financiers solides et crédibles. Reste au Cameroun à transformer la contrainte en opportunité en s’engageant résolument sur la voie de la conformité internationale. Car dans l’économie mondiale actuelle, la confiance n’est pas un luxe : c’est une condition de survie.
Patrick Tchounjo



