Cameroun : les exportations franchissent la barre historique des 1 000 milliards FCFA au premier trimestre 2025

Le commerce extérieur du Cameroun affiche une vitalité exceptionnelle. Selon les données publiées par l’Institut national de la statistique (INS), les exportations du pays ont atteint 1 118 milliards FCFA au premier trimestre 2025, contre 826 milliards FCFA sur la même période en 2024. Une performance inédite qui confirme la montée en puissance du Cameroun sur les marchés internationaux et le rôle moteur de ses produits agricoles et énergétiques.
Le principal fait marquant de ce trimestre reste la domination du cacao, qui détrône pour la première fois le pétrole brut comme première source de devises du pays. Les ventes de fèves ont généré 500,3 milliards FCFA, soit près de 45 % du total des exportations, profitant d’une conjoncture internationale favorable marquée par la flambée des cours mondiaux. Le pétrole brut, deuxième produit d’exportation, a rapporté 212 milliards FCFA, tandis que le gaz naturel liquéfié a contribué à hauteur de 122 milliards FCFA.
Cette performance record s’est traduite par une nette amélioration de la balance commerciale, dont le déficit s’est contracté de 88 % pour s’établir à 32,7 milliards FCFA. Le taux de couverture des importations par les exportations a bondi à 97,2 %, contre 75,2 % l’année précédente, témoignant d’un rééquilibrage significatif du commerce extérieur camerounais.
Au-delà des chiffres, cette embellie traduit le potentiel croissant du Cameroun à diversifier ses moteurs de croissance. Si les exportations énergétiques continuent de peser lourd, l’essor du cacao, des produits agricoles transformés et du gaz conforte la stratégie gouvernementale de montée en gamme. Toutefois, cette dynamique reste fragile, car elle repose davantage sur l’évolution des prix mondiaux que sur une véritable expansion des volumes exportés.
Les économistes y voient un double signal. D’un côté, la résilience de l’économie camerounaise face à la conjoncture internationale, et de l’autre, la nécessité d’accélérer la transformation locale pour réduire la dépendance aux matières premières brutes. La valorisation du cacao, par exemple, pourrait tripler la valeur ajoutée nationale si elle s’accompagnait d’une industrialisation plus poussée du secteur agroalimentaire.
Cette progression des exportations redonne également de l’air aux réserves de change et renforce la stabilité macroéconomique du pays. Elle contribue à réduire la pression sur le franc CFA et à améliorer la position extérieure du Cameroun au sein de la CEMAC, région encore dominée par les exportations pétrolières.
L’enjeu désormais est de consolider cette trajectoire. Le gouvernement devra poursuivre ses efforts pour diversifier les débouchés, renforcer les infrastructures portuaires et logistiques, et soutenir les filières exportatrices à forte valeur ajoutée. Dans un environnement mondial incertain, la capacité du Cameroun à transformer cette performance conjoncturelle en croissance durable sera le véritable test de sa maturité économique.
Le pays vient de franchir un cap historique, mais la stabilité de cette réussite dépendra de la cohérence entre politique commerciale, stratégie industrielle et gouvernance économique. Pour la première fois, le cacao a supplanté le pétrole. Pour que cela devienne un modèle de développement durable, le Cameroun devra miser sur la transformation locale, la compétitivité régionale et l’innovation agro-industrielle.
Patrick Tchounjo



