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BEAC : À Malabo, la banque centrale de la CEMAC trace la voie d’une nouvelle ère monétaire et institutionnelle

Le Conseil d’administration de la Banque des États de l’Afrique Centrale (BEAC) s’est réuni le 6 octobre 2025 à Malabo, en République de Guinée équatoriale, sous la présidence de Monsieur Ivan Bacale Ebe Molina, Ministre des Finances, de la Planification et du Développement Économique. Cette session ordinaire intervient à un moment charnière pour la zone CEMAC, où les économies cherchent à concilier stabilité monétaire, reprise de la croissance et réformes structurelles profondes.

La rencontre de Malabo a permis de dresser un état des lieux complet de la situation macroéconomique régionale et de débattre des orientations futures de la politique monétaire, alors que la BEAC s’apprête à engager une nouvelle phase stratégique à l’horizon 2030. Les administrateurs ont passé en revue l’exécution des résolutions précédentes, approuvé les rapports du Comité d’audit et du Collège des censeurs, et validé les états financiers pour l’exercice clos au 31 décembre 2024. Ces travaux traduisent la volonté de renforcer la transparence et la gouvernance interne au sein de l’institution.

L’un des points majeurs de la session a porté sur l’adoption d’une stratégie de renforcement des fonds propres de la BEAC pour la période 2025-2030. Ce dispositif vise à consolider la solidité financière de la banque centrale, à renforcer sa capacité d’intervention et à soutenir la mise en œuvre de son ambitieux programme d’investissement institutionnel et immobilier. Ce plan s’inscrit dans la continuité du repositionnement de la BEAC en acteur de stabilité et d’intégration financière au sein de la CEMAC.

La réunion a également été l’occasion d’adopter plusieurs réformes réglementaires d’envergure destinées à moderniser le cadre bancaire régional. Le Conseil a ainsi approuvé un règlement sur les Caisses de Dépôts et Consignations (CDC) de la CEMAC, un outil essentiel pour canaliser l’épargne publique et privée vers le financement de long terme. Il a aussi validé un texte encadrant la gestion des comptes inactifs et des avoirs en déshérence dans les établissements de crédit placés sous la supervision de la Commission bancaire de l’Afrique centrale (COBAC). Ces mesures visent à améliorer la transparence, protéger les déposants et assainir davantage le secteur financier sous-régional.

Sur le plan monétaire, les discussions ont mis en évidence un contexte favorable à un assouplissement prudent de la politique de taux. La baisse récente de l’inflation et la remontée des réserves extérieures offrent une marge de manœuvre à la BEAC pour soutenir le crédit sans compromettre la stabilité des prix. La zone CEMAC affiche en 2025 une croissance projetée de 2,9 %, contre 2,6 % en 2024, portée par la reprise des activités non pétrolières et par un environnement macroéconomique plus stable. Cependant, la vigilance reste de mise face aux tensions budgétaires et aux incertitudes géopolitiques mondiales qui continuent de peser sur les économies de la région.

Les administrateurs ont insisté sur la nécessité d’une meilleure coordination entre les politiques monétaires et budgétaires des États membres. Le respect des critères de convergence, la discipline dans la gestion de la dette publique et l’amélioration du climat des affaires sont des prérequis essentiels pour garantir l’efficacité des réformes engagées. La coopération renforcée avec le Fonds monétaire international et les partenaires techniques demeure un pilier central de cette stratégie.

En toile de fond, la session de Malabo marque une étape importante dans la montée en puissance institutionnelle de la BEAC. L’institution veut désormais conjuguer solidité financière, crédibilité monétaire et transparence réglementaire, tout en soutenant la transformation structurelle des économies de la CEMAC. Le défi consistera à trouver l’équilibre entre flexibilité et rigueur, entre politique de soutien à la croissance et préservation de la stabilité monétaire.

En conclusion, la BEAC affiche à travers cette session sa volonté d’incarner une banque centrale moderne, proactive et résiliente. En posant les bases d’un cadre réglementaire renforcé et d’une gouvernance rénovée, elle se positionne comme un levier majeur de la stabilité et de la transformation économique de la sous-région. La réunion de Malabo ne fut pas seulement une formalité administrative, mais le signal d’un nouveau cycle où la banque centrale veut conjuguer souveraineté monétaire, crédibilité institutionnelle et innovation financière.

Patrick Tchounjo

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