Afrique : la BAD débloque 6 millions USD pour renforcer la couverture contre les catastrophes climatiques

Face à la recrudescence des catastrophes naturelles et aux besoins croissants de financement anticipatif sur le continent, la Banque africaine de développement (BAD) a approuvé une allocation exceptionnelle de 6 millions de dollars en faveur de l’African Risk Capacity (ARC), la mutuelle panafricaine de gestion des risques. Ce soutien vise à assurer la continuité des services essentiels de l’institution sur la période 2025-2026, au profit des pays membres de l’Union africaine.
La décision, prise le 29 octobre 2025 par le Conseil d’administration de la BAD, s’inscrit dans le cadre du programme ADRiFi (Programme africain de financement des risques de catastrophe), destiné à renforcer la résilience climatique des pays africains par l’assurance souveraine.
Un filet de sécurité mutualisé face aux aléas climatiques
L’ARC fonctionne comme un mécanisme d’assurance climatique mutualisé. Elle propose aux pays membres des polices paramétriques contre des risques tels que la sécheresse, les inondations ou les cyclones. Lorsque des seuils climatiques prédéfinis sont franchis, les indemnités sont déclenchées rapidement, permettant une réponse d’urgence dans des délais courts.
Depuis sa création, l’ARC a permis à plusieurs États — dont Madagascar, le Niger et la Côte d’Ivoire de mobiliser des fonds rapides après des événements extrêmes. Cependant, la souscription demeure limitée en raison des contraintes budgétaires des pays, qui peinent à payer régulièrement leurs primes d’assurance.
Des capacités techniques et financières à consolider
L’enveloppe de 6 millions USD allouée par la BAD doit permettre à l’ARC de poursuivre deux priorités :
En ligne de mire : garantir que les États les plus exposés puissent accéder à des mécanismes prévisibles de financement en cas de choc climatique. L’allocation contribuera également à élargir l’accès à l’assurance, en soutenant le développement de nouveaux produits et l’accompagnement des pays qui souhaitent rejoindre le dispositif.
Une réponse à une pression climatique croissante
Alors que l’Afrique ne génère que 3 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, elle en subit des conséquences disproportionnées. La fréquence accrue des sécheresses, inondations et autres événements extrêmes met en péril la stabilité économique de plusieurs pays.
Pour les institutions africaines, le défi est double : anticiper les crises tout en s’affranchissant d’une dépendance structurelle à l’aide humanitaire post-catastrophe. Le modèle de l’ARC, fondé sur la prévention et la mutualisation du risque, est aujourd’hui l’un des rares dispositifs africains permettant de combler ce vide.
Une couverture encore inégale
Malgré les bénéfices démontrés, la couverture demeure faible : seuls quelques pays par an sont en mesure de souscrire à l’ARC, souvent avec l’appui de bailleurs. Des programmes comme ADRiFi ont permis de subventionner partiellement les primes, mais la soutenabilité du mécanisme reste un sujet de préoccupation.
Selon les estimations, l’ARC affiche un déficit de financement de près de 68 millions de dollars sur les cinq prochaines années. L’allocation de la BAD, bien qu’importante, ne couvre qu’une partie de ce besoin.
Vers une résilience plus structurée
À moyen terme, la stratégie des institutions africaines consiste à ancrer l’assurance climatique dans les politiques publiques, tout en plaidant pour un élargissement du soutien international. Plusieurs initiatives régionales visent à intégrer la logique de préparation dans les plans budgétaires et les systèmes de protection sociale.
En renforçant l’ARC, la BAD envoie un signal de confiance dans une solution africaine à un défi mondial. Reste à convaincre davantage de pays à s’engager, et à trouver les mécanismes pour stabiliser ce levier de résilience, face à un climat de plus en plus imprévisible.
Patrick Tchounjo



