Climat : la BDEAC lance une campagne de mobilisation de 10 milliards USD pour le Fonds Bleu du Bassin du Congo

La Banque de Développement des États de l’Afrique Centrale (BDEAC) s’engage dans une levée de fonds ambitieuse : mobiliser 10 milliards de dollars pour financer le Fonds Bleu pour le Bassin du Congo, un mécanisme régional destiné à soutenir des projets de développement durable en Afrique centrale. Cette initiative, portée en partenariat avec la Commission Climat du Bassin du Congo (CCBC), prévoit un plan d’investissement structuré autour de 254 projets.
Le calendrier de cette opération se déploiera en deux temps : une pré-table ronde des bailleurs est programmée en novembre 2025 à Belém, au Brésil, en marge de la COP30. Elle sera suivie d’une table ronde principale en mai 2026 à Brazzaville, en République du Congo. Objectif : structurer des engagements financiers solides en faveur d’un portefeuille régional multisectoriel.
Une initiative structurante pour la finance climat en Afrique centrale
Le Fonds Bleu, conçu comme un instrument africain de financement climatique, vise à promouvoir une économie bleue intégrée dans la région. L’approche repose sur une utilisation durable des ressources naturelles : fleuves, forêts, terres agricoles et énergies renouvelables. La BDEAC, désignée institution hôte du Fonds, est chargée de préparer les projets, de piloter la stratégie de mobilisation et d’en assurer la gestion financière.
La Commission Climat, quant à elle, assure la coordination politique régionale. Elle regroupe 16 pays d’Afrique centrale et de l’Est, dont le Congo, la RDC, le Gabon, le Cameroun, mais aussi des États côtiers ouest-africains comme la Guinée ou la Sierra Leone. Cette gouvernance intégrée permet d’ancrer l’initiative dans un cadre africain légitime et cohérent.
254 projets pour bâtir une économie bleue
Le plan d’investissement du Fonds Bleu couvre cinq domaines prioritaires : l’eau et l’assainissement, l’agriculture durable, les énergies renouvelables, la mobilité fluviale et la gestion des forêts. Les projets prévus visent à améliorer l’accès à l’eau potable, renforcer les infrastructures d’irrigation, développer la pisciculture durable, installer des centrales hydroélectriques, moderniser la navigation sur le fleuve Congo et soutenir la protection des forêts tropicales.
L’ensemble du portefeuille a été sélectionné selon des critères de viabilité technique, d’impact environnemental et de cohérence régionale. La majorité des projets émanent des États, mais certains sont portés par des ONG ou acteurs privés, dans une logique de cofinancement public-privé. Cette diversité d’origines permet de structurer des montages financiers flexibles, mêlant subventions, prêts concessionnels et capital d’impact.
Deux rendez-vous diplomatiques pour séduire les bailleurs
La première phase de mobilisation se déroulera à l’occasion de la COP30, dans la ville brésilienne de Belém, située au cœur du bassin amazonien. Cette symbolique n’est pas anodine : en associant le Bassin du Congo à l’Amazonie, les États d’Afrique centrale entendent renforcer leur visibilité et rappeler le rôle crucial de leurs forêts dans la régulation du climat mondial.
La table ronde principale, prévue à Brazzaville en mai 2026, devra formaliser les contributions promises. Elle réunira les États membres, les bailleurs bilatéraux et multilatéraux, les institutions financières internationales et des investisseurs privés. À cette occasion, les 254 projets feront l’objet de présentations détaillées afin de susciter des engagements financiers ciblés.
Un test pour la solidarité climatique mondiale
Le Fonds Bleu cristallise plusieurs enjeux. Pour les pays du Bassin du Congo, il s’agit de prouver leur capacité à structurer une offre crédible de projets bancables, conforme aux exigences des bailleurs. Pour la communauté internationale, l’initiative offre une opportunité de rééquilibrer les flux de financement climat, encore très concentrés sur d’autres régions du monde.
En misant sur la transparence, la gouvernance partagée et la rigueur dans la sélection des projets, la BDEAC espère convaincre ses partenaires que l’Afrique centrale est prête à gérer efficacement des financements d’envergure. Une réussite placerait le Fonds Bleu parmi les premiers instruments africains à canaliser des ressources massives vers une transition écologique régionale.
La route reste incertaine, mais le signal envoyé est clair : face à l’urgence climatique et à la pression sur les forêts tropicales, l’Afrique centrale cherche désormais à capter une part équitable des ressources mondiales, tout en affirmant sa souveraineté sur ses stratégies de développement durable. Le rendez-vous de Belém, puis celui de Brazzaville, pourraient en être les marqueurs décisifs.
Patrick Tchounjo



